Contrairement à mes habitudes de travail, cette série est née d’une recherche fauve, animale. Si j’avais depuis un moment l’idée très formelle de nus au sténopé, c’est une autre nécessité, plus primitive qui m’a guidé vers ces images.

En seulement quelques jours se sont accumulés dans mon appareil des centaines d’images que je suis allé chercher intuitivement auprès de forêts, de murs, de chemins, de corps.

Cohabitent dans ces formes une tendresse taciturne et une frayeur intestine. Ces images sont davantage des traces, elles parlent de cet enfant apeuré en moi qui redoute avec stupeur la disparition des choses et des êtres.

Ces images, par leur trouble, leur noirceur, leurs couleurs sous-marines essaient de rendre sensible la fragilité intolérable, l’éphémère inconcevable de leurs objets.

La juxtaposition de peaux, d’écorces, de surfaces inertes appartenant à des rochers, à des arbres, à des corps dilue l’image de ces derniers dans le paysage d’un monde silencieux et dénué de sens dans lequel nous sommes perdus et laissés infiniment seuls.

Émerge alors avec force cette tristesse irrésolue, cette peur capitale et implacable, celle de la certitude de la perte.